Quand on parle du système de santé des Etats-Unis, les témoignages abondent sur le coût prohibitif des soins. Sicko, le documentaire engagé du trublion Michael Moore (qu’on peut revoir en cliquant ici), fait froid dans le dos aux assurés français, en particulier cette scène où un patient doit choisir le doigt qui pourra lui être recousu après un accident… Les premiers exemples concrets que je vis en Californie confirment malheureusement cette situation.
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Alors, combien coûte une prise en charge en urgence ?
Une de mes amies est tombée malade il y a quelques semaines. Rien de grave, juste un virus d’hiver. Comme son état ne s’améliorait pas de lui-même, et que ses ganglions étaient particulièrement gonflés et douloureux, elle a décidé d’aller voir son médecin. Comme elle n’avait pas encore de médecin traitant en Californie, elle a été adressée à un centre de soins urgents.
Les centres de soins urgents ne sont pas adossés à des hôpitaux. Il s’agit de structures autonomes, fonctionnant 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Staffés par des médecins et des infirmières, ils ont l’expertise pour traiter la plupart des situations qui se présentent. Ils organisent des transferts vers les hôpitaux voisins pour les situations plus complexes.
Le centre où mon amie s’est rendue n’a pas souhaité prendre de décision au vu de son tableau clinique, et a prescrit des examens complémentaires. Elle a donc été orientée vers le service d’accueil des urgences du CHU voisin, avec, en poche une facture de $1 500 pour la consultation spécialisée.
La situation atteint alors son paroxysme, comme en témoigne la facture que j’ai prise en photo :
Son séjour de 3 heures dans un box aux urgences coûte donc la modique somme de 17 277,76 dollars, qui se décomposent comme suit :
- $4 828.00 pour un scanner
- $9 395.00 pour son hospitalisation (de 3 heures donc)
- $1 279.00 pour une perfusion IV
- $1 336.00 d’examens de laboratoire
- $639.76 de pharmacie
Cette facture révèle le décrochage des coûts facturés vis-à-vis des coûts réels. Je n’ai pas de connaissances très pointues sur la T2A en France mais je suis persuadée que nous sommes loin de ces niveaux de coûts réels ou facturés. Même avec des ratios de personnel et des coûts assurantiels supérieurs, j’ai du mal à imaginer que le coût d’un séjour de 3 heures dans un box des urgences américains soit de plus de 9000€.
Ce décrochage des coûts facturés explique notamment le montant des dépenses de santé aux Etats-Unis (17% du PIB contre 11% pour la France).
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Certes, c’est (très) cher mais quel est le reste à charge pour le patient ?
Mon amie bénéficie d’une très bonne assurance par son conjoint, qui travaille dans une multinationale. Cependant, comme en témoigne la facture, ses soins ne sont pas couverts à 100%. Son assurance prend en charge $15 415.60 mais il lui reste $1 862.16 à payer de sa poche…
Cela s’explique avec les « deductible » : même pour les très bonnes assurances maladie, une franchise annuelle est appliquée sur les dépenses de santé. Cette franchise s’élève, pour mon amie, à $2 500.00… Donc quoi qu’il en soit, si elle est malade, elle aura a minima une dépense de ce niveau. On comprend mieux pourquoi les Américains sont stressés par la vie et parlent beaucoup d’argent !
La conclusion de cet épisode, c’est que, selon mon amie, « les hôpitaux américains sont quand même nettement plus propres que les hôpitaux français ». Et d’ajouter que les toilettes publiques en France sont souvent répugnantes, y compris dans les hôpitaux, ce qui, selon elle, est peut rassurant sur l’hygiène globale de l’établissement. Et moi de justifier avec peu d’enthousiasme du manque de moyens des hôpitaux français… et de me dire que je serai particulièrement vigilante sur ce type de prestations à l’avenir !
céline
•8 ans ago
Merci pour cet éclairage du système de santé américain. Il est clair que je préfère être française (et oui, je suis d’accord, les toilettes publiques sont une honte !).
Pour les prix décrochés, voici un éclairage vu (de mémoire donc paraphrasé) dans le film “La Sociale”. Un médecin spécialisé dans les maladies du foie nous explique qu’ils administrent un traitement coutant 150 dollars à la fabrication mais revendus 45 000 € à l’hôpital. La justification d’un tel décalage (un gouffre) serait issue d’une philosophie américaine : plus le bénéfice pour le patient est important, plus le prix facturé serait conséquent et finalement peu importe le coût de fabrication… On est loin du serment d’Hippocrate.
A la fin de la projection, il y a eu un débat où la différence de PIB a été largement discutée. Un des arguments avancé pour expliquer cette différence importante, notamment en vue des soins apportés, serait les frais de gestion du privé qui impliquent des frais de communication/publicité/marketing des différentes compagnies d’assurance qui relèveraient les prix de santé.
La liberté de choisir son assurance a un sacré prix…